Un objectif : le retrait complet de la réforme des retraites
Une nécessité : l’arrêt de toute concertation
À en croire les propos d’Édouard Philippe, l’objectif des discussions menées avec les directions syndicales serait de trouver des « compromis ». En réalité, il ne s’agit que de leur faire avaliser quelques miettes pour cautionner le maintien du projet de réforme de retraite à points et faire refluer la mobilisation.
Les travailleurs ont bien compris qu’il n’y a pas de compromis possible sur ce projet inacceptable et dont ils demandent le retrait. Pour Noël, la poursuite de grèves et la pugnacité des salariés ont mis en échec une partie du plan du gouvernement. Mais les dangers demeurent.
Pour Noël, pas de trêve de la grève
Après les grèves et manifestations massives du 17 décembre, le Premier ministre a organisé deux jours de concertations avec les directions syndicales, auxquelles toutes se sont rendues. Avec ces concertations, l’objectif du gouvernement était de mettre fin à la mobilisation. Ainsi, le 19 décembre au soir, E. Philippe déclarait qu’il maintenait le projet de retraites par points, mais acceptait « d’améliorer les solutions proposées par le gouvernement dans une logique de compromis avec les partenaires sociaux ». Il annonçait de nouvelles concertations pour janvier et concluait que les « avancées » déjà obtenues ces deux derniers jours devaient « permettre une reprise du travail dans les entreprises de transport public ». De fait, la Cfdt et l’Unsa appelèrent à la trêve de la grève.
Mais à la Sncf comme à la Ratp, la base en décida autrement. Et c’est unis que les salariés non syndiqués et les salariés syndiqués à l’Unsa, à la Cfdt, à la CGT et à Solidaires poursuivirent la grève. Dans d’autres secteurs, comme la culture, la grève s’est poursuivie et se poursuit encore. En outre, de nouvelles raffineries ont voté la mise à l’arrêt de leur production. La solidarité avec les grévistes se renforce comme en témoigne la multiplication des caisses de grève et le montant des sommes récoltées (comme celle de la caisse Info’com CGT).
Tout cela montre la détermination des salariés à combattre Macron et son projet, et leur capacité à mettre en échec, au moins partiellement, la stratégie de division du gouvernement.
Pour Noël, pas de trêve pour le dialogue social
Mais la détermination du gouvernement est également très forte et face à la combativité des salariés, il cherche à poursuivre les concertations pendant les vacances de Noël, sans attendre la rentrée de janvier. L’objectif est de diviser le plus possible les salariés, secteurs par secteurs, en associant les directions syndicales à des discussions sur la base de son projet, et en lâchant quelques miettes à la marge. Ce qu’il appelle « le dialogue social ».
« Édouard Philippe avait proposé de poursuivre ces négociations dès aujourd’hui, ce sont les partenaires sociaux qui ont décidé de fixer ce nouveau rendez-vous à la rentrée », à partir du 7 janvier (France 3, le 23 décembre). Ainsi les confédérations syndicales ne poursuivent pas officiellement les concertations pendant les vacances de Noël mais les ministres concernés restent « sur le pont » et des syndicats poursuivent les concertations avec des ministres dans certains secteurs (transport, fonction publique...). « Et s’il n’y a pas de rendez-vous officiel à l’agenda, les téléphones continueront de sonner pendant la période des fêtes ».
Cette absence de trêve du dialogue social pour Noël a permis au gouvernement de remporter des succès. Le mardi 24 décembre, notamment, quatre syndicats de stewards et d’hôtesses de l’air (dont FO et l’Unsa) lèvent leur préavis de grève pour le 3 janvier car ils auraient obtenu, entre autres, des « garanties » sur l’âge de départ en retraite. Le vendredi 27, le syndicat majoritaire des pilotes leur emboîtait le pas.
Les syndicats, enjeu de la lutte des classes
Ainsi, fin décembre, alors que certaines confédérations syndicales comme FO disent exiger le « retrait » de la réforme des retraites, certains de leurs syndicats (comme celui des de stewards et d’hôtesses de l’air, le SNPNS-FO) ne demandent pas le retrait, cherchent et obtiennent quelques concessions, et acceptent de facto la réforme de retraites par points.
Dans d’autres confédérations qui ne demandent pas le retrait et souhaitaient une trêve à Noël, comme la Cfdt et l’Unsa, se manifeste clairement la pression de la base : ainsi la Cfdt Cheminot est contrainte de refuser la trêve tandis qu’à l’Unsa-ferroviaire nombre d’adhérents poursuivent la grève.
De façon très claire, les syndicats apparaissent comme un enjeu de la lutte des classes. A la base, en quelques mois, les salariés sont arrivés à imposer à plusieurs des syndicats qu’ils revendiquent le retrait de toute la réforme (pour rappel après 18 mois de concertations, aucune direction syndicale n’en exigeait le retrait) et ils sont arrivés à imposer la grève pour leur revendication. À l’inverse, le gouvernement cherche à utiliser les directions syndicales pour casser la mobilisation, utilisant une arme institutionnalisée sous le terme de ’dialogue social’ ou via des discussions moins formelles. Ainsi, en parallèle de concertations sectorielles pendant les vacances de Noël, le gouvernement a publié le lundi 23 décembre le calendrier des thèmes des concertations prévues à partir du 7 janvier : sur la pénibilité, les fins de carrière, les minimums de pension et puis les transitions d’un régime à l’autre. Et d’autres concertations doivent se poursuivre l’année durant.
Pour des organisations au service des travailleurs
Avec ces concertations, l’objectif du gouvernement est d’associer les directions syndicales afin de leur faire cautionner le projet de réforme de retraite par points, et d’essouffler la mobilisation. Ainsi, plus que jamais il nous faut réaffirmer et imposer aux directions syndicales le refus de se rendre à de telles concertations car le projet de réforme des retraites n’est pas amendable ni négociable.
L’unité des directions syndicales,
– pour le retrait pur et simple de l’intégralité du projet de réforme de retraites à points,
– pour le refus de se rendre à toutes les concertations proposées par le gouvernement,
serait un point d’appui important pour imposer le retrait pur et simple, immédiat, de ce projet néfaste et infliger une défaite à Macron.
Dans plusieurs AG, de tels appels ont vu le jour, souvent concentrés dans la formulation : « ni amendable, ni négociable », formule reprise par quelques Unions Départementales syndicales. Cette exigence doit s’imposer à l’ensemble des directions syndicales, comme a été imposé, à certaines d’entre elles, l’exigence de retrait et la grève.
L’aspiration à l’unité pour le retrait de la réforme s’exprime aussi au sein des partis dits de « gauche ». Ces derniers, du PS et du PCF jusqu’au NPA et LO (avec le rajout de EELV) ont été amenés à tenir meeting commun (ce qui n’était pas arrivé depuis très longtemps) pour le retrait de la réforme. Mais en même temps le PS et le PCF veulent proposer des amendements lorsque le projet gouvernemental sera déposé à l’Assemblée. À l’inverse, nous devons dire : la véritable unité ne peut se réaliser que pour le retrait pur et simple, sans amendement ni concertation.