Ukraine : un mouvement révolutionnaire totalement légitime impose le départ de Ianoukovitch
Le 22 février, après trois mois de mobilisation, après une répression sauvage ayant provoqué plus de 80 morts, le président Viktor Ianoukovitch s’enfuyait de Kiev pour aller demander l’aide de son protecteur russe. Aussitôt, alors que le nouveau gouvernement transitoire venait à peine d’être formé en Ukraine, Poutine organisait l’occupation militaire de la Crimée, région jusqu’alors reconnue comme ukrainienne par les accords entre Russie et Ukraine, avec le statut particulier de république autonome. En quelques heures, les rivalités inter-impérialistes devenaient brutalement conflictuelles, mettant aux prises les impérialismes dominants (états-Unis, France et Grande Bretagne, Allemagne, etc) et l’impérialisme russe (appuyé par le gouvernement chinois), les uns et les autres faisant valoir leurs intérêts, lesquels sont contradictoires à ceux du peuple ukrainien, toutes composantes (linguistiques) inclues.
Il faut donc dire clairement que c’est une mobilisation révolutionnaire qui a imposé la chute du régime, que c’est une exceptionnelle mobilisation de masses qui a entraîné son effondrement, en dépit du vote de lois liberticides en janvier, en dépit d’une répression policière d’une rare violence, en dépit de l’accord trouvé le 21 février qui visait à établir un compromis laissant en place Viktor Ianoukovitch (accord passé sous l’égide des médiateurs envoyés par l’Union européenne et en présence du représentant russe). Mais le peuple ukrainien voulait la chute immédiate de Viktor Ianoukovitch et l’a imposée.
Que des organisations réactionnaires, ultra nationalistes (ou néo-fascistes) soient venues parasiter cette révolution, aient joué un rôle dans les affrontements, est une réalité, d’autant plus « visible » que les organisations ouvrières sont très faibles du fait de l’histoire de l’Ukraine. Mais c’est une réalité surmédiatisée, qui ne saurait cacher que la grande masse des insurgés n’avait rien à voir avec ces groupes, et souvent cherchait à s’en préserver.
Et ce combat révolutionnaire fut auto-organisé, renouant avec les plus anciennes traditions d’auto organisation. En même temps, se cristallisant principalement (mais pas seulement) par l’occupation de la place Maïdan, cette insurrection révolutionnaire s’est aussi inscrite dans une continuité avec la vague révolutionnaire qui a jailli en Tunisie en janvier 2011 et dont l’occupation des places (celle de la Kasbah à Tunis, place Tahrir au Caire) fut l’un des emblèmes.
Certes, l’ordre économique et social, celui du capitalisme, n’a pas pour autant été abattu. L’essentiel des moyens de production demeure aux mains d’une poignée de capitalistes mafieux qui se sont accaparés les richesses au moment où le capitalisme fut réintroduit en Ukraine. L’appareil d’état, bien que fissuré dans certaines villes et régions, est pour l’essentiel demeuré en place en tant qu’appareil bourgeois assurant la défense des intérêts capitalistes.
Quant au nouveau gouvernement, que soutiennent certains des oligarques, il annonce d’ores et déjà qu’il devra imposer des « sacrifices » à la population.
Il n’empêche que c’est une révolution, soutenue par la grande majorité du peuple ukrainien, y compris par une part de sa composante russophone, qui a mis à bas le pouvoir. Et cela est intolérable pour tous les gouvernements bourgeois.
(Russie, états-Unis, puissances de l’UE dont la France)